LE MONDE | 01.04.08 |
Les députés examinent en première lecture, jusqu'au 3 avril, le projet de loi sur les organismes
génétiquement modifiés (OGM). L'esprit de ce texte, basé sur les compromis obtenus lors du
Grenelle de l'environnement, a été sensiblement modifié lors de son examen par le Sénat, début
février, dans un sens favorable aux OGM. Lors de ce débat, le sénateur UMP de la Manche, Jean-
François Le Grand, s'est trouvé isolé au sein de son propre groupe parlementaire. Ses collègues
n'avaient pas apprécié de l'entendre exprimer, lorsqu'il présidait le comité de préfiguration de la
Haute Autorité sur les OGM, des "doutes sérieux" sur le MON 810, variété de maïs transgénique de
Monsanto dont la culture en France est depuis suspendue. Sa position, partagée par le député UMP
François Grosdidier, est très minoritaire au sein de son parti.
Comment expliquez-vous votre mise au ban du groupe UMP au Sénat lors de l'examen de la loi sur
les OGM ?
Certains ont fait main basse sur l'UMP afin de défendre des intérêts mercantiles, "ripolinés" pour les
rendre sympathiques : on a parlé de l'avenir de la science, de celui de la recherche... La force de
frappe de Monsanto et des autres semenciers est phénoménale. Il fallait voir la violence des
réactions de Bernard Accoyer (président de l'Assemblée nationale) et d'autres au lendemain de l'avis
rendu par le Comité de préfiguration. Il suffit de comparer les argumentaires des uns et des autres -
identiques - pour comprendre l'origine de leur colère. Ils ont été actionnés. J'ai été approché par
Monsanto, et j'ai refusé de leur parler. Je veux rester libre.
Les conclusions de ce comité de préfiguration, que vous présidiez, ont suscité de vives critiques, y
compris en son sein. Etes-vous allés trop vite ?
Même si certains ont déclaré a posteriori qu'une relecture aurait été utile, le texte final a bien été
validé par l'ensemble du comité. La conclusion du comité était qu'il subsistait des interrogations au
niveau de l'évaluation du risque, qui est du ressort de la science et de la société, et des doutes
concernant la gestion du risque, qui revient au politique. On ne peut pas affirmer, par exemple, qu'il
n'existe pas de risque de dissémination des OGM.
Pourquoi avoir choisi de monter au créneau sur cette question des OGM ?
Je pense que le XXIe siècle sera un siècle de restructuration autour d'un nouveau modèle qui verra
l'homme placé au coeur des préoccupations. La question des OGM est un combat d'arrière-garde,
mené par ceux qui pensent encore que l'économie l'emporte sur l'homme : des obscurantistes qui
ferment les yeux sur le devenir du monde.
Que pensez-vous des OGM ?
Il faut continuer la recherche et ne pas se précipiter dans la prise de décision. J'ai eu le privilège de
vivre le Grenelle de l'environnement de l'intérieur, en tant que président du groupe sur la biodiversité
et de l'intergroupe sur les OGM. J'en ai tiré la conviction que la biodiversité doit être protégée à tout
prix et que les OGM constituent un inconvénient à ce niveau. Leur intérêt est plus que douteux, y
compris pour les agriculteurs.
Quelle attitude comptez-vous adopter lors de la seconde lecture de la loi au Sénat, dans quelques
semaines ?
Je ne renonce pas à faire valoir mon point de vue au sein de mon parti, car je reste persuadé que
l'intérêt économique à court terme ne peut pas l'emporter sur l'intérêt sociétal. Je déposerai à
nouveau des amendements et j'essayerai d'expliquer posément à mes collègues pourquoi je ne suis
pas d'accord avec eux. Lors de la première lecture, certains se sont réfugiés dans une attitude
confortable qui consiste à chasser en meute plutôt que de se poser les questions de fond. J'ai retiré
mes amendements pour obliger le groupe UMP à se retrouver face au gouvernement. En un weekend,
j'ai reçu 1 700 mails d'encouragement. L'Elysée et Matignon m'ont fait passer des messages
dans le même sens.
Propos recueillis par Gilles van Kote
http://www.lemonde.fr/sciences-et-environnement/article/2008/04/01/un-senateur-ump-estime-que-desparlementaires-
mardi 1 avril 2008
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